Ce rapport qui pourrait être décisif pour votre avenir financier
Laissez-nous d’entrée de jeu vous poser deux questions qui tuent : connaissez-vous le rendement après frais qu’a réalisé votre portefeuille en 2018 et sur plusieurs années ? Cette performance est-elle bonne, convenable ou plutôt lamentable ?
Le changement d’année représente pour la plupart des épargnants le moment propice pour faire le bilan de son portefeuille de placements. L’année 2018 vous a peut-être paru un chemin de croix et vous brûlez d’impatience de comparer votre performance à celle du beau-frère ou de la belle-sœur.
Les nouvelles règles de divulgation mises en place par les autorités canadiennes en valeurs mobilières ces dernières années promettaient une nouvelle ère de transparence en matière de divulgation des rendements et des frais.
Force est de constater que la révolution espérée ne s’est pas encore concrétisée. L’analyse de dizaines de portefeuilles de clients potentiels nous amène à croire qu’une majorité d’épargnants peinent à mesurer le rendement après frais de leur portefeuille. Pire, ils sont souvent incapables de déterminer si leur conseiller leur en donne pour leur argent.
Cela peut se comprendre. Les rapports de rendement qu’ils reçoivent sont souvent trop complexes et ne présentent pas l’information qui compte vraiment.
Les principales failles
Les autorités exigent que les conseillers affichent les rendements par type de compte (REER, CELI, comptant, etc.). Selon nous, le rapport idéal peut néanmoins tenir sur une page et présenter de façon claire le rendement après frais du portefeuille dans son ensemble sur différentes périodes, à court et à long terme.
Pour bien évaluer un conseiller, il ne faut pas se fier uniquement au rendement de la dernière année, mais sur une période d’au moins cinq ans. C’est la seule façon d’éliminer les facteurs aléatoires qui peuvent survenir sur une courte période. Vous pourrez ainsi juger avec rigueur de la stratégie d’investissement et du tempérament de votre conseiller dans plusieurs contextes qui caractérisent un cycle boursier, autant favorables que défavorables.
Bien que ce ne soit pas exigé par les autorités, le rapport de rendement devrait également présenter un barème de référence qui permet de comparer la performance du portefeuille.
Enfin, le rapport devrait afficher le montant net investi, qui tient compte des ajouts et des retraits d’argent, ainsi que la valeur en dollars du portefeuille à la fin de la période visée.
Cela peut paraître une évidence, mais il est aberrant de constater le grand nombre de rapports de rendement qui présentent un portrait faussé ou indécodable pour le commun des mortels. Ils parviennent même à égarer des entrepreneurs qui passent leurs journées à décortiquer des rapports financiers.
Pour apprivoiser cet outil ô combien crucial dans l’atteinte de vos objectifs financiers, il est capital de connaître leurs principales failles.
Une des principales faiblesses que l’on observe réside dans la présentation des rendements. Il arrive que des épargnants doivent se rendre à la fin d’un relevé d’une dizaine de pages pour repérer le chiffre qui compte vraiment.
Courage à celui qui veut trouver le rendement global de son portefeuille après avoir épluché la panoplie de transactions réalisées par le conseiller au cours de la période, pris connaissance de la valeur comptable de chacun des fonds communs détenus, ou encore analysé le détail portant sur la perception d’un montant de 2 $ pour les taxes de vente. Si vous êtes incapable de trouver votre rendement, demandez-le à votre conseiller.
Il est impossible de mesurer la performance de son portefeuille sans avoir le bon barème de référence. La plupart des rapports de rendement en mettent un de l’avant. Là où le bât blesse, c’est qu’ils ne sont pas représentatifs des placements détenus.
Par défaut, de nombreux rapports mettent de l’avant l’indice S&P/TSX de la Bourse de Toronto. Voilà qui peut être trompeur : rares sont les portefeuilles constitués uniquement de titres canadiens. Le barème doit refléter le mieux possible la composition du portefeuille (actions américaines, actions mondiales, titres à revenu fixe, etc.).
L’autre grande faille des barèmes présentés est qu’ils excluent les dividendes et intérêts versés par les titres. Cela a pour effet d’enjoliver la performance du portefeuille par rapport à son indice de référence.
La meilleure façon de déterminer si votre portefeuille surpasse ou non le marché est d’utiliser les fonds négociés en Bourse (FNB) les plus représentatifs. Par exemple, un portefeuille composé d’actions canadiennes et américaines, ainsi qu’une portion à revenus fixes, devrait être comparé à un FNB représentant l’indice S&P/TSX, un FNB reflétant l’indice S&P 500 et un FNB reproduisant les obligations.
Comme ces fonds affichent les rendements après frais et reflètent les dividendes et intérêts versés par les titres, ils constituent un excellent baromètre.
Autre grande lacune souvent observée : le rendement est affiché dans une devise et celui du barème, dans une autre. La comparaison sera imparfaite si l’effet des devises est écarté.
Comparez des pommes avec des pommes
Avant de vous lancer dans les comparaisons, prenez certaines précautions.
Assurez-vous de comparer des pommes avec des pommes si vous mettez en parallèle la performance de deux conseillers ou gestionnaires de portefeuille.
Il faut au préalable connaître la pondération en actions et en revenus fixes de chacun afin d’évaluer les rendements sur une même base. Confirmez que les rendements présentés par l’autre conseiller sont nets de frais et tiennent compte des dividendes et des intérêts.
Autre élément à vérifier : le rendement présenté par le conseiller du beau-frère ou de la belle-sœur est-il celui d’un portefeuille personnel ou de la moyenne des portefeuilles de ses clients ? Le portrait peut être faussé si le conseiller présente le rendement de son portefeuille personnel et fait ainsi abstraction des frais de gestion normalement facturés aux clients.
Le devoir de tout conseiller
Ne vous contentez pas de connaître le rendement du dernier mois ou de la dernière année.
Si votre conseiller ne vous fournit pas les rendements sur une période de cinq ans et plus, vous serez incapable de juger adéquatement de l’efficacité de sa stratégie. Le rendement à court terme n’est pas révélateur. Même les meilleurs investisseurs, tel Warren Buffett, affichent une performance inférieure aux marchés une année sur trois.
Il incombe à tout conseiller ou gestionnaire de portefeuille de fournir à ses clients les bons outils permettant d’évaluer sa démarche. N’hésitez pas à aborder la question du rendement si la personne qui gère votre argent omet de le faire. C’est la seule façon de savoir si elle vous en donne vraiment pour votre argent.
Cinq questions fondamentales à poser à votre conseiller1. Le rendement présenté dans le rapport est-il net de frais ? 2. Le barème mis de l’avant inclut-il les dividendes et les intérêts versés par les titres ? 3. Le rendement du portefeuille est-il présenté dans la même devise que le barème de référence ? 4. Pourquoi avoir choisi tel barème ? Est-il vraiment représentatif de la composition de mon portefeuille ? 5. Comment avez-vous généré les rendements présentés dans le rapport ? Cette question est à développement. Vous pourrez juger de la qualité des explications lorsque votre conseiller vous remettra votre rapport ou par l’entremise de ses communications (lettre annuelle, etc.). |
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Texte écrit par Eddy Chandonnet est gestionnaire de portefeuille, et Yannick Clérouin, conseiller.
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